[Pv Jasper] T'as d'beaux yeux, tu sais ?

Mon regard noir se pose sur Jasper. La réunion des mauvaises nouvelles s'était terminée, enfin, plutôt les autres étaient partis, plus ou moins énervés. Je croisais les bras sur ma poitrine, respirant lentement. Un réflexe que j'avais gardé de mon ancienne vie, un réflexe bien inutile mais qui permettait de sauvegarder les apparences.

L'expression sur mon visage en dit long sur mon ressenti actuel. Je ne suis que chagrin et fureur. Mon regard est froid de même que mon visage. ainsi, malgré mon éternelle jeunesse, je paraissais avoir pris quelques années. J'avais regagné l'assurance et la prestance du patriarche de la famille. Mon rôle était de tous les protéger, de tous les mener sur le droit chemin, je m'en était fait la promesse.

Ainsi, je regardais avec sévérité mon fils aux pupilles écarlates. Je savais très bien ce que cela signifiait et ça ne me plaisais guère. Certes, il avait ses raisons mais je n'approuvais pas le fait de tuer des humains pour assouvir sa soif de colère.
Mon regard le transperce, la colère dégouline de mon corps, je suis furieux, réellement. Les événements présents n'étaient pas des excuses pour ainsi craquer et anéantir toutes ces années de sevrage.

Jasper, commençais-je, froid, allons chasser.

C'était un ordre, pas une proposition. Je désirais remettre en place mon fils... Enfin, je souhaitais surtout l'aider à se libérer de sa douleur. Jasper était sûrement la personne qui était la plus affectée par les récents événements. Et je le comprends. Il a déjà vécu une trahison de la sorte. Il devait être brisé.

Décroisant les bras, je me dirige vers la porte et l'ouvre en grand. L'air était froid, tout comme nous. Malgré la faible éclaircie, le temps restait maussade. Comme s'il se mettait au diapason de nos émotions.
Je mets un pieds dehors. Une première depuis des semaines. Les effluves de la nature m'envahissent. L'air humide, l'odeur de la terre et des sapins effleurent mes narines. Je suis tendu. J'ai soif. Je ne fais que le réaliser maintenant. Cependant, je tiens à garder toute ma prestance et mon autorité face à Jasper. Ca n'était pas le moment de se montrer faible. J'étais le père de cette famille et je me devais de me comporter comme tel.

Suis moi fils, dis-je, toujours froid.

Sur ces mots, je m'enfonçais dans la forêt bordant notre villa. Il y avait tant de souvenirs heureux qui planaient ici. Je n'y fis guère attention, marchant à un rythme élevé. Je ne souhaitais pas me mettre en chasse tout de suite. Je désirais simplement avoir une discussion sérieuse avec ce jeune homme que j'affectionnais beaucoup. Comme le reste de ma famille en fait. Quoi qu'Edward et Alice étaient un peu retombé dans mon estime.

Après quelques instants à s'enfoncer dans la forêt, je m'arrête et fais face à Jasper, à cet ancien soldat brisé. Je croise les bras. Mon visage se fait cependant moins froid. Il n'en demeure pas moins que je reste furieux face à son comportement.

Pourquoi ? demandais-je simplement.

Oups...

Jasper ne comptait pas rester trop longtemps à Forks. Parce qu'il ne restait que pour sauver Esmée. Une fois que sa mission serait portée à bien, il quitterait les lieux. A quoi bon rester dans un endroit où il ne ferait que ressasser le passé de toute manière ?

Alors que la réunion d'urgence se terminait, le regard de l'Empathe se tournait déjà vers Isabella,
cherchant un soutien qu'il ne trouva qu'à moitié. Mais c'était normal après tout, puisqu'elle retrouvait sa fille et son meilleur ami après un moment d'absence. Quand aux autres, ils étaient déjà tous partis,
méditant sûrement à ses paroles. Peut-être qu'il n'aurait jamais dû revenir au final... D'autant plus qu'il avait commis la pire de ses conneries en se nourrissant sans aucune pitié d'humains.

Son regard carmin rencontra alors celui, noir, de Carlisle. Et tout ce qu'il put ressentir en sondant ses émotions fut sa fureur. Connaissant le patriarche de la famille, il n'allait pas le lâcher avant d'avoir eu une conversation ensemble. Alors lorsqu'il lui dit - ou plutôt ordonna - froidement d'aller chasser,
Jasper ne broncha même pas. Il se contenta juste d'envoyer un regard noir à Edward, en passant devant lui. Parce qu'au final, tout était de sa faute. S'il n'avait pas touché Alice une seule seconde rien de tout cela ne se serait passé...

Retenant un soupir blasé, le blond sortit donc à la suite du médecin, essayant de chercher une excuse valable. D'autant plus que Bella lui avait déjà fait la morale lorsqu'ils étaient seuls. Sauf qu'il n'avait aucune excuse valable pour le coup. Alors, il préférait se taire et se faire oublier. Après tout, c'était ce qu'il savait faire le mieux d'habitude.

Il resta donc stoïque et se stoppa net lorsque Carlisle le décida, en soutenant son regard. Il n'allait pas s'abaisser à s'excuser. Après tout, s'il avait été Végétarien par le passé, ce n'était que à cause d'Alice. Et Alice n'était plus là... Alors à quoi bon le redevenir ? A part peut-être pour Bella...

Lorsque le plus vieux lui demanda alors des explications, Jasper resta silencieux un instant, cherchant la bonne réponse. De toute manière, il n'avait jamais été celui qui parlait le plus dans la famille.
Il préférait de loin écouter les autres et observer leurs faits et gestes. Alors, se retrouver ainsi face à celui qui était comme un père pour lui le déstabilisait un peu. Mais il fallait bien se lancer un jour ou l'autre.

- Je veux assouvir ma vengeance. Et j'ai besoin d'infiltrer les Volturi pour les faire tomber les uns après les autres. Il faut qu'ils croient que je suis l'un des leurs.

Après tout, c'était un demi vérité. Il s'était bien présenté à Caïus en lui assurant vouloir être l'un des leurs. Et Bella et Rosalie étaient toutes les deux dans la confidence de ses plans de vengeance.
Tant pis s'il en perdait la vie après tout...

Il resta donc ainsi, face au chef de leur clan, prêt à prendre toutes les représailles qu'il allait lui faire.
Et même si Carlisle tentait de le retenir, l'Empathe n'allait pas flancher...

Je restais interdit un instant. Mon regard furieux ne cessait de le scruter. Cependant, je ne pouvais pas lui en vouloir. Quel père pourrait en vouloir à ses enfants ? Non, c'était plus de la tristesse que je ressentais en ce moment. Une tristesse qui faisait écho à la douleur bien évidente de mon fils. Je ne souhaitais pas le sermonner, je voulais juste comprendre à quel point il était détruit.

Laisse moi t'aider, mon fils, voulus-je dire, mais je me muais dans un silence lourd de sens. Je ne désirais qu'une seule chose: réparer les blessures de ma famille, panser ses plaies, c'était mon rôle de médecin mais surtout de père. Voir mes enfants ainsi me déchirait les entrailles. Je souffrais de l'absence de ma chère et tendre mais également de la douleur omniprésente chez le reste de ma famille.

Qui avait été aussi inhumain pour nous infliger ça ? Je ne faisais que réaliser l'ampleur de la cruauté du monde dans lequel nous vivions. Quelque part, j'avais refusé de voir cette vérité, trop heureux d'avoir découvert mon havre de paix. Quelque part j'avais été égoïste de créer cette famille pour briser ma solitude. Ma première erreur fut celle-ci. La seconde fut de ne pas avoir put empêcher Edward et Alice d'aller à Volterra.

J'étais en colère, oui, je portais toute la fureur du monde, mais elle était en grande partie retournée contre moi. Quel père, quel mari oserait infliger ça à sa famille ?

Mon regard gardait cependant sa froideur et mon expression en disait long sur ce que je pensais des explications de mon aîné. Je savais qu'il ne m'avait jamais réellement considéré comme un père. J'étais un chef de clan pour lui, une autorité supérieure. Il avait été soldat, pourquoi lui en vouloir ? D'autant plus que nous n'étions pas liés par quelconque liens. C'est pour cela que je ne pouvais pas le retenir, lui et Alice. Mais je les aimais tout de même. C'était la le comble de tout ceci. Je ne pouvais pas être autoritaire envers eux mais je me sentais de l'être tout de même, prenant mon rôle de père trop à coeur.

Mais j'avais espéré cette famille, au plus profond de moi j'avais espéré et je m'étais fourvoyé. tout n'étais que mascarade pour les humains. Et jamais je ne pourrais réellement connaitre ce sentiment d'être père. Ce que j'enviais parfois à Edward...

Mon fils, pourquoi de tels choix ? Pourquoi te laisser guider par la vengeance. Tu le sais aussi bien que moi, ça n'est pas la solution et tu risques d'y perdre la vie. Je ne le veux pas. Si j'en avais le pouvoir, je te retiendrais ici, je te protègerais de ce sentiment destructeur qu'est le sentiment de vengeance, de colère. Mais je ne peux pas. De tous, tu es celui qui a le plus de légitimité à faire cela. Et comprends moi, ça me brise, ça me déchire...

Le silence pesait sur nous. Seul le vent venait le rompre par moment. Les animaux fuyaient face à notre odeur et il n'y avait plus âme qui vive autour de nous. La colère était toujours présente mais c'était ma tristesse qui t'étais adressée, Jasper. La tristesse de savoir que tu te murais derrière des excuses pour calmer ton chagrin. Ô fils, laisse moi t'aider...

Je ne savais pas quoi dire. Mon rôle aurait voulu que je le sermonne et l'apostrophe. Mais je n'avais pas le coeur à sermonner un esprit aussi brisé que le sien. Je décroisais les bras, les laissant branlant le long de mon corps inerte. Je ne me séparais pas de mon air froid mais tout en moi hurlait le contraire.

Je m'approche de toi, mon fils et je t'enlaces comme un père enlacerait son fils. Je ne peux rien te dire mais tu sais ce que je pense. Je vous aime tant et vous voir ainsi me déchire. Te voir ainsi me brise, Jasper. Et j'ose espérer que tu te décides à changer d'avis et à revenir.

Fais les bons choix, dis-je simplement en me détachant de toi, retrouvant ma droiture et mon immobilité. Je n'avais pas le coeur à bouger. Cela me demandais des ressources qui n'existaient plus. Des ressources que j'avais épuisées pour garder contenant face à ma famille déchirée, face à ma tendre disparue et face à toi, mon fils.

Oups...

Jasper n'avait jamais voulu qu'on éprouve de la pitié pour lui en réalité. Alors, lorsqu'il ressentit de plein fouet la tristesse de Carlisle envers ses paroles, il croisa ses bras sur son torse, histoire d'avoir un point d'accroche et ne pas simplement flancher et s'enfuir en courant. Parce qu'au fond, il n'avait plus envie de ressentir cette ambiance morose à longueur de journée. Pire encore, il n'avait pas envie de rester à la villa pour se rappeler continuellement tous les bons moments passés avec Alice. Au final, l'amour, ça faisait toujours mal...

Les deux membres de la famille restèrent donc là, silencieux, les yeux ocres dans les yeux rouges.
Et bien évidemment, Jasper avait un certain désavantage dans cette situation puisqu'il ressentait chacune des émotions du membre de la famille pour lequel il éprouvait le plus de respect actuellement. Un respect qu'il avait trahi en se nourrissant de sang humain. Du sang humain dont il était devenu bien trop dépendant pour espérer pouvoir s'en sortir seul.

Cette pensée lui fit baisser les yeux au sol et il retint un soupir de frustration, plus touché par la tristesse et la rage mêlées de Carlisle qu'il ne le pensait. Et ce mélange de sentiment l'empêchait de penser correctement à vrai dire. Pourtant, il savait qu'il lui faudrait prendre une décision, plutôt que de rester là, à attendre que la tempête ne daigne passer un jour. Parce que c'était clairement le calme avant la tempête...

Mais contre toute attente, alors que l'Empathe s'attendait à recevoir le sermon de sa vie, le médecin s'avança vers lui et l'enlaça. Peu habitué à ce genre de contact, la réaction de Jasper fut presqu'immédiate alors qu'il ressentait la pitié de son père adoptif. Et c'est ainsi qu'il se raidit, sur la défensive. Il y avait forcément aiguille sous roche, non ?

L'instant ne dura qu'un moment et le sanguinaire se décontracta rapidement lorsque le végétarien le relâcha. Il lui faisait du chantage, là, non ? Jasper l'observa donc, à la fois suspicieux et totalement perdu. Faire les bons choix, c'était plus facile à dire qu'à faire, en réalité. Et habituellement, pour faire ses choix, il se basait sur les visions d'Alice... Qui n'était plus là...

D'ailleurs, qu'aurait-elle fait, elle, en les voyant ainsi, immobiles, à se jauger du regard sans rien dire de plus. Elle leur aurait sûrement dit de se décontracter de sa voix fluette et il aurait ri. Sauf qu'il n'avait plus le coeur à rire. Ni à ressentir quoique ce soit.

En tout cas, dans le cas actuel, faire les bons choix, c'était peut-être bien se décider à bouger un peu,
histoire de mettre un peu de distance avec les sentiments négatifs qui l'accablaient. Et c'est pour cela qu'il finit par lâcher, avec plein d'insolence dans le ton de sa voix :

- On ne devait pas aller chasser ?

Lui n'avait pas soif du tout. Ou du moins, pas de sang animal. Mais au vu du regard noir de Carlisle,
ce dernier était affamé. Alors si le patriarche lui faisait du chantage, lui aussi pouvait en faire un peu,
non ?

- J'irai me nourrir que si tu viens avec moi. Tu ne voudrais tout de même pas qu'il arrive quelque chose, n'est-ce-pas ? Un accident est si vite arrivé...

Lui, de toute manière, il ne misait même pas sur le fait de redevenir végétarien tout de suite. Et puis,
il avait toujours son opération chez les Volturi à mener...

Je regarde Jasper sans ciller face à son insolence. Je suis épuisé, je n'ai plus la force de me battre contre lui. Lui qui n'était pas comme ça avant. Je ne bougeais pas. Un père de famille ? Un exemple pour tous ? Un faible oui. Il était bien beau le docteur Cullen, faible, fatigué et sur la pente descendante. Mon regard n'exprimait plus grand chose de même que mon visage restait de marbre.

J'avais envie de hurler, de te hurler à quel point tu te trompais. Mais cela serait-il vraiment utile ? Seul un long soupire sortait de ma bouche tandis que je secouais lentement la tête. Tu cherches une quelconque réaction en moi. Tu me connais, mon fils, tu sais que je n'approuve pas ton régime et que je suis prêt à tout pour t'empêcher de produire cet accident.
Je me pince l'arrête du nez, fronçant les sourcils.

Tu es dur en affaires, Jasper. Et tu ne me fais visiblement plus confiance. Comment pourrais-je à mon tour te faire confiance désormais ? Tu as brisé tout ce que j'ai tenté de construire avec toi. Tu a réduit à néant des années d'effort. Comment pourrais-je te pardonner ?

La réponse est pourtant simple, tu es mon fils et je t'aime même si les liens du sang ne nous lient pas.

Je n'arriverais pas à te faire changer d'avis, n'est-ce pas ? soufflais-je.

Je ressemblais à une statue, immobile. Mais je n'avais plus envie de bouger. Ah il est beau le grand Carlisle sage et calme. Je n'étais plus que l'ombre de moi même. Mon regard noir se pose sur Jasper. Nous n'avions pas tant d'écart d'âge que ça et tu pourrais être mon frère. Mais j'ai choisis d'être ton père pour te guider, pour te protéger, du monde et de toi même.

Ce n'est pas la peine de monter ce chantage, Jasper. Quoi que je dise, quoi que je fasse, tu iras tout de même tuer des humains. Mes mots n'ont aucune valeur à tes yeux. Et de toute façon, tu n'as pas envie de chasser à mes côtés et je n'ai pas envie de chasser non plus.

Mon ton était las, dépourvu de toute colère, il demeurait cependant froid et quelque peu accusateur. Je m'étais résigné à te perdre, mon fils. Je détourne le regard, honteux de mes pensées actuelles, honteux de t'abandonner ainsi, en proie à ton désire de vengeance.

Cependant, s'il me reste ne serait-ce qu'un infime espoir que je puisse t'aider... je le ferais...

Je lui tourne le dos et contemple cette forêt où nous avions été chassé tant de fois.

Tu m'en veux de ne pas avoir pu retenir Alice et Edward, n'est-ce pas ?

Tout le monde avait des raisons de lui en vouloir, lui qui n'avait pas sut protéger sa famille. Il était minable, bon qu'à jouer la comédie. Il n'était pas un père de famille respectable. Il laissais les siens se déchirer, se blesser, se séparer.

Je ne vais pas te retenir. Mais... puis-je oser espérer que tu reviennes un jour ?

Je te tournais toujours le dos. Je n'avais plus la force de te faire face. Minable, je n'étais qu'un minable qui ne désirais que fuir loin de ces regards tristes.

Oups...

Jasper n'était pas habitué à voir Carlisle agir de la sorte. Mais il était bien trop en colère contre le monde entier pour s'en offusquer en réalité. Il se contenta donc de faire face au patriarche de la famille qui poussait maintenant un long soupir. Bien évidemment qu'il n'allait pas le faire changer d'avis en agissant de la sorte...

L'Empathe se contenta donc se hocher négativement la tête. De toute manière, il n'avait pas envie de rester dans cet endroit qui ressemblait plus à l'enfer qu'autre chose. Et au fond, les paroles de son "père" le brisèrent encore plus. Tout simplement, parce qu'il lui faisait bien comprendre qu'il ne lui faisait plus aucune confiance.

Jasper resta alors un moment consterné par la situation. Parce qu'il ne s'attendait pas à ce que le patriarche laisse tomber aussi facilement...

- Tu ne sais pas mentir. Je sais très bien que tu as aussi soif que moi.

Au moins, lui avouais à demi-mot qu'il avait soif de sang. Il ne savait cependant pas s'il allait apprécier de nouveau de se nourrir de sang animal. Et puis de toute manière, s'il comptait infiltrer les Volturi, ce n'était pas avec les yeux ocres qu'il allait le faire... Ce n'est que lorsqu'il entendit le mot "espoir" de la bouche du médecin que Jasper revint dans la conversation, en répliquant platement :

- L'espoir, hein ? Il n'y a plus aucun espoir dans ce monde.

Tout simplement parce que l'espoir dans cette famille n'était autre qu'Alice. Et depuis qu'elle était partie, l'ambiance à la villa était plus que morne. Et le fait que lui-même déprimait n'aidait pas à rendre l'ambiance moins pesante... Mais après, est-ce-que Jasper en voulait réellement à Carlisle de ne pas avoir pu retenir son frère - en qui il avait placé toute sa confiance par le passé soit dit en passant - et sa femme ? Non pas vraiment...

- Je n'en veux qu'à moi. Je n'ai pas été à la hauteur pour aller sauver Alice...

C'était à cette conclusion qu'il en était arrivé suite au départ de sa femme. Sinon, pourquoi serait-elle partie après tout ? Et c'était aussi ce qui l'avait conduit après coup en Italie, afin de mettre son plan de vengeance a exécution. Et il comptait bien ne pas le lâcher tant qu'il ne serait pas mener à terme...

Cependant, le fait que Carlisle lui donne le dos le déprimait plus qu'il ne l'était déjà. Et lorsqu'il finit par l'informer qu'il n'allait pas le retenir, avant de lui demander s'il allait revenir un jour, ce fut la chose à ne pas dire en réalité. Et c'est la colère qui reprit alors le dessus :

- Donc, en fait, tu me laisses simplement partir comme ça, sans même essayer de me retenir ? C'est pas du tout ton genre, réagis un peu !

Le vampire sanguinaire se plaça alors devant son père, pour tenter de capter son attention, laissant ses flux d'émotions négatives le toucher. Parce qu'après tout, c'était de sa faute s'il était dans cet état actuellement. Et Jasper lui en voulait terriblement de ne même pas tenter une chose pour le retenir. Où était donc passé le chef de clan autoritaire ?

Ca n'étaient pas mes sentiments que je ressentais à présent. Toute cette colère, c'était la tienne. Je relève la tête, guidé par des sentiments qui n'étaient pas les miens. Je n'avais qu'une envie, mon fils, c'est de te retenir ici. Mais je n'avais plus la force de me perdre corps et âme dans un combat qui de toute manière était perdue d'avance.

Je ne te comprenais pas. Tu jouais avec mes nerfs pour ensuite me demander d'être ce patriarche autoritaire et si sage que je fusse avant. Jasper, a quoi joues-tu ? Mon regard devient froid tandis que je laisse tes émotions se mêler aux miennes. Tu cherches à me sortir de ma torpeur, tu cherches à ce que je reprenne ce rôle qui était le mien.

Au final, que cherches-tu à faire ? Me guider vers ma déchéance en me jetant à la figure tous ces reproches ? Bravo, tu as gagné, Jasper, tu as réussis à me mettre hors de mes gongs. Chose si rare habituellement.
Mes poings se serrent alors que mon regard noir se pose sur toi. Tu as raison, j'ai soif, si soif de vengeance. Ils ont prit ma femme et tout ce que tu cherches à faire c'est de me demander de te retenir ? Cesses de jouer à ce jeu, mon fils.

Je t'attrape par les épaules, plongeant mon regard courroucé dans le tien. Ces sentiments, cette colère, tout cela n'est pas à moi. Je ne peux pas supporter ta colère en plus de la mienne et tu le sais bien. J'inspire grandement, m'enivrant des odeurs alentours. Les animaux étaient loin mais j'arrivais tout de même à sentir leur fumet. Je refusais cependant de perdre contenance face à Jasper. Aussi je me concentrais sur son visage et sur ses yeux rouges alimentant ma colère.

Que je réagisse ? Mais bon sang ! J'ai perdu ma femme ! Je la croyais perdue à jamais jusqu'à tout à l'heure. Et qu'apprends-je ? Qu'elle s'est montrée à toi et seulement à toi. Vous me rendez tous fous de douleur !

Je me redresse et sers les dents. Merci Jasper, grâce à toi mon coeur se délivrait de toute sa colère. Mais j'aurais aimé qu'il en fusse autrement et que ce soit toi qui vienne me parler librement de tes maux.

Notre famille est brisée ! Avec Bella vous vous êtes enfuis sans explication. Lorsque vous revenez j'apprends que la femme de ma vie est retenue prisonnière dans un centre de recherche ignoble. Que devrais-je faire face à tout cela, Jasper ?! Que dois-je faire ?! Comment veux-tu que je garde contenance face à toute cette douleur et ce désespoir ?!

Je hurlais. Fait rare mais je hurlais. Mes yeux reflétaient la colère et la souffrance d'un homme qui n'en pouvait plus, qui était perdu.

Et pour couronner le tout, mon fils, tu te montres devant moi avec ces yeux ocre. J'avais confiance en toi, Jasper. Comment puis-je te retenir alors que ta décision est prise depuis longtemps ? Dois-je te supplier pour que tu restes ici avec Bella ? Je ne souhaite pas user de cette pseudo autorité parentale.

Je laisse le silence reprendre ses droits un moment avant de continuer, toujours submergé par cette colère qui n'était pas mienne.

Restes. Cesses toutes ces folies. Ca n'est pas toi tout ça, ça n'est plus toi. Tu as changé, fils. Pourquoi ? dis-je en reprenant ses mots.

Oups...

Ce n'était pas vraiment très franc et courageux de faire en sorte d'utiliser sa propre colère contre Carlisle afin de le faire parler pour le délivrer un peu de sa douleur. Mais Jasper n'appréciait pas vraiment le fait que le patriarche de la famille ne réagisse pas. La famille était assez morcelée comme ça pour qu'en plus Carlisle se perdre aussi... Autant le secouer un peu !

Alors lorsque Carlisle finit par prendre la parole, en se confiant sans gêne sur le fait que toute sa famille le rendait fous de douleur, l'Empathe ne cilla même pas. Parce qu'il savait pertinemment que tout le monde souffrait à la maison. Bien mieux que quiconque. Sauf que c'était finit le temps où il était là pour rassurer et calmer tout le monde...

- T'es pas le seul à avoir perdu ta femme. Sauf que toi, tu as une chance de la retrouver et que tu ne l'utilises même pas...

Ca n'avait rien d'un reproche, mais simplement une constatation. Et puis ce n'était pas la faute du médecin si Alice était partie. C'était une décision qu'ils avaient pris à deux. Et puis ne disait-on pas en plus qu'aimer les autres, c'était les laisser libre de partir ?

Par contre, le chef de clan semblait avoir des reproches à lui faire. Et il se fit plaisir, toujours sous le joug de la colère d'ouvrir son coeur. Jasper le laissa faire, totalement insensible à toutes ces remarques. Parce que de toute manière, il ne se sentait pas responsable. S'il était parti en premier lieu, c'était parce que l'ambiance qui régnait à la villa l'avait rendu malade. Quand à Bella, il ne savait même pas qu'elle était partie avant qu'elle ne le retrouve par surprise à Volterra...

- Et bien justement, utilise ta douleur et ta colère comme un moteur que comme un frein. Pourquoi tu crois que je suis parti ?

Parce que malgré tout, l'Empathe n'était pas parti en vacances, loin de là. Même si pour le moment il n'avait pas agit contre ses ennemis de toujours, il restait non loin à les observer. C'était la partie la plus longue du plan mais cela lui permettrait de prendre les bonnes décisions concernant la suite.

Malgré tout, le père de famille hurlait maintenant. Jasper était prêt à parier que toute la villa pouvait les entendre. Mais il n'en avait cure. Et il acceptait même sans sourciller le reproche principal de Carlisle, à savoir son changement de régime alimentaire. De toute façon, toute la famille savait plus ou moins que le blond n'était resté que pour Alice... Et c'était une période révolue à présent.

- Peu importe. Les yeux rouges ou les yeux or, qu'est ce que ça change au final ?

En tout cas, cette confrontation avec celui qu'il considérait le plus comme un mentor lui avait fait du bien et sa rage commençait peu à peu à se calmer. Il inspira alors, même si cela n'était plus vraiment utile pour lui. Il ne comptait pas user de son don pour calmer Carlisle cependant. Parce qu'il avait besoin de cette rage pour avancer un peu. Quoiqu'elle n'était pas vraiment bénéfique au sanguinaire qui devait justifier ses actions maintenant...

- Pourquoi ? Parce qu'Alice n'est plus là. L'espoir est parti, littéralement parlant. Tu voulais que je me raccroche à quoi ?

Et puis, autant qu'il s'en aille tant qu'il était encore temps plutôt que de commettre une bêtise en s'en prenant à Edward. Finalement, toute cette histoire ne l'aidait pas tellement à savoir s'il devait rester pour tenter de conserver la soi disante unité de la famille ou s'il devait se montrer égoïste et fuir à nouveau avec Bella, quitte même à ne pas se venger de ses ennemis...

Tant de colère en moi. Jasper, en ce moment je te déteste autant que je t'aime. Tu es un monstre de me briser ainsi et pourtant je te remercie de ton empathie. Humain, j'aurais dû rougir, avoir les veines gonflant sur mes tempes, mais il n'en était rien. Mon visage demeurait lisse, beau, seulement déformé par mes yeux noirs et la ride qui s'était formée sur mon front. J'enviais les humains d'être si expressif du visage.

Ma colère retomba d'elle même, doucement, pas totalement mais elle retomba. La bombe à retardement que j'étais avait partiellement explosé grâce à l'insubordination de cet homme que je considérais comme mon fils. Mais en rien il n'en fut réciproque. Jasper était un loup solitaire qui ne s'accrochait à cette famille que parce qu'Alice était là. Il n'avait plus à faire par ici et je le comprenais parfaitement. Néanmoins, nous avions passé assez de temps ensemble à jouer la comédie pour que je finisse par croire ce mensonge.

Passant une main sur mon visage, je soupirais longuement. Je n'avais aucune envie de tenir tête plus longtemps à Jasper. Le raisonner était impossible et seule Alice avait le pouvoir de le faire. Mais son départ avait affecté tout le monde. Je ferme les yeux tout en me pinçant l'arrête du nez, geste typiquement humain que j'avais gardé pour contrôler un tant soi peu mon agacement. Puis mon regard douloureux, furieux mais sûr se poser sur mon fils. Je n'avais plus rien à lui dire et il n'avait pas besoin de mes mots pour comprendre mes sentiments. Pour comprendre ce sentiment de trahison qui courrait dans mon corps, s'amusant follement de concert avec la douleur de l'absence d'Esmée ou la colère de voir cette famille brisée.

Je balayais d'une main toute cette discussion. Elle n'avait servit à rien et il ne servait à rien de s'éterniser dans ces bois. Ca n'était pas aujourd'hui que j'allais aller chasser. Tu as gagné, je ne me battrais plus pour toi si c'est ce que tu désires. Tu as décidé de quitter notre famille, je ne peux te retenir seul. Tu n'as plus aucune accroche par ici. Je soupirais de nouveau tout en détournant la tête, me fixant sur le lointain. Puis je me retournais pour retrouver mon antre, mon refuge. J'avais abandonné, malgré ses tentatives de me raisonner. J'avais abandonné, lâchement.

Mon seul but était maintenant de sauver Esmée, quoi qu'il arrive.

Dépêche toi de finir les préparatifs. Nous ne pouvons pas laisser Esmée là bas plus longtemps, finis-je tout de même par dire sans pour autant le regarder.

Mes pas m'éloignèrent de lui. Je n'avais plus la force de m'énerver contre toi, Jasper. Fais comme bon te semble désormais.

Oups...

Jasper avait raté son entreprise de faire en sorte que Carlisle reprenne son clan en main. Parce que tout allait au plus mal actuellement. Mais tout avait échoué en réalité. Parce que ce que ressentait actuellement l'Empathe, au plus profond du patriarche de la famille Cullen, c'était de la déception et un sentiment de trahison. Ce qui voulait donc dire qu'au fond, Carlisle ne voulait pas le départ du Vampire. Mais pour l'instant, il n'était pas question de départ en soi... Parce qu'au plus profond de lui, Jasper était perdu. Entre Rosalie qui ne souhaitait pas son départ, Bella qui le soutenait quoiqu'il fasse et les ressentiments de Carlisle, il ne savait plus vraiment où il avait sa place pour le moment.

Il arqua donc les sourcils lorsque Carlisle décida d'arrêter toute cette discussion. Au final, il n'en avait même pas pris pour son grade. Il ressentait simplement maintenant de l'indifférence à son égard et au final, c'était ce qui le blessait le plus. Il en revenait toujours au même point : le rejet... Mais ça faisait encore plus mal lorsqu'il venait de sa propre famille...

Il haussa alors les épaules lorsque le chef de famille lui ordonna de finir les préparatifs pour aller chercher Esmée. Il approuva d'un léger signe de tête, le laissant s'éloigner vers la villa. Poussant donc un profond soupir de frustration, Jasper décida de se diriger vers la forêt. Que Carlisle ne veuille pas se nourrir, tant pis pour lui, mais lui en avait besoin. Cependant, il devait honorer les promesses qu'il avait faites à Bella. Un cerf ferait bien l'affaire pour son repas...