Du haut de mon arbre, j'entendais tout. Le souffle court d'une biche qui venait d'échapper à un prédateur de justesse, le battement d'ailes rapide d'un colibri, le coeur d'un humain ayant décidé d'aller faire de l'escalade quelques kilomètres plus loin. Je sentais le fumet délicieux d'un puma, à l'Est. Ainsi que le parfum délicat des fleurs qui s'épanouissaient sous moi, dans les quelques rayons du soleil qui parvenaient tant bien que mal à passer au travers des arbres feuillus. Mes yeux captaient le mouvement furtif d'une couleuvre qui se glissait jusqu'à sa cachette, le frottement de son corps mou sur le sol couvert de verdure. Sa tête triangulaire ne m'effrayait pas, et je me contentais de le laisser passer sous moi, sans bouger d'un muscle. Mes cheveux blancs tombèrent sur le côté de mon visage, et j'esquissais un sourire. Ils avaient gentiment accepté qu'aujourd'hui, je sois Yasmine, et pas une simple voix dans la tête d'un autre.
Cela me rassurait, d'un côté. Nous cohabitions sans peine, car nous avions appris à nous écouter les uns les autres, à prendre chaque avis en compte, et surtout à nous respecter. Nous avions des règles, des principes, et même si parfois ils étaient enfreints, chacun d'entre nous savaient les respecter quand il le fallait. Quand c'était nécessaire. J'avais aujourd'hui opté pour un débardeur noir, surmonté d'une chemisette blanche à fleurs rouges et noires. En bas, je portais un jean slim noir, simple, et mes pieds étaient couverts d'une paire de jolies petites ballerines blanches. Rien de vraiment spécial, même si j'aimais être présentable, mon corps s'adaptait à chaque tenue. Je savais me mettre en valeur, et ce malgré le fait que parfois, j'avais du mal à me décider pour mes affaires. Heureusement que les autres m'aidaient à choisir, de temps en temps, parce qu'il y a des jours... J'y passerais des heures.
Mes cheveux détachés avaient glissé le long de mes joues, et je les repoussais calmement d'un seul côté. Sur la droite, comme toujours. Puis, d'un seul coup, je me laissais tomber au sol. Mes pieds rencontrèrent l'herbe tendre, avant que je ne me relève tranquillement. Tournant ma tête d'un côté, puis de l'autre, je cherchais un endroit où aller. Non pas que l'arbre était inconfortable, parce qu'en réalité, un vampire peut bien se mettre où il veut sans jamais être mal installé. Mais je commençais vraiment à m'ennuyer profondément, un long bâillement s'échappa de ma bouche. Mes ongles longs et blancs passèrent un peu sur un arbre, attrapant délicatement un lézard qui avait espéré échapper à ma rapidité vampirique. Mes écailles brillaient aux rayons du soleil, et il se débattait pour s'échapper. Mais mes doigts le tenaient fermement, sans lui faire le moindre mal.
Il était beau, avec sa belle couleur verte. Je le reposais doucement à l'endroit où je l'avais trouvé, et il fila à toute allure le long du tronc pour se glisser dans un minuscule trou pour s'y réfugier. Je ne m'attardais pas davantage, prenant le temps pour finalement me rapprocher un peu de la ville. C'était calme, en ce moment. Les animaux pullulaient par endroits, mais j'avais chassé la veille, je n'avais pas besoin de tuer de nouveau aujourd'hui. Je sentais une odeur qui, irrésistiblement, m'attirait. Une odeur pas totalement humaine, mais en même temps proche de celle des humains. Je m'approchais à allure lente pour un vampire, avant de tomber nez à nez avec une demoiselle. Elle était brune, et plutôt jolie. Je souris doucement avant de déclarer :
Salut !
Rien de plus à ajouter, je verrais bien sa réaction. Aurait-elle peur de mes prunelles dorées ?