[Solo] Mémoires d'un patriarche impuissant

Mercredi / 2017

Je ne sais même plus quel mois nous sommes. Sûrement proche de l'hiver, les feuilles commencent à déserter les arbres et la forêt se teinte d'un somptueux camaïeux d'orangés.

Cela fait plusieurs jours qu'elle est partie. Je l'ai cherchée, si longtemps, avant de finir par me convaincre qu'elle s'était lassée de mes absences.
Je n'ai aucune excuse à fournir. Je fuyais ma famille, je fuyais ma propre femme. Je fuyais pour ne plus voir tous ceux que j'aimais, se déchirer.
Mais cela n'a fait qu'empirer les choses... M'enfermant dans le travail je n'ai pas remarqué ce besoin d'attention et de présence qui se faisait de plus en plus grand. J'ai fuis mon rôle de patriarche et voilà où nous en sommes. Plus personne n'ose rester dans cette villa.

Du jour au lendemain, elle avait disparue. Je n'osais pas y croire. Elle que j'aimais plus que tout. Elle qui me disait ne jamais pouvoir s'éloigner de moi bien longtemps. Voilà plusieurs jours que nous étions séparés et je n'osais le croire. Il devait lui être arrivé quelque chose, j'en étais sûr. Mais alors, pourquoi demeurais-je là, à ne rien faire ? Pourquoi restais-je ici à me lamenter sur les pages d'un vieux journal que j'avais cessé d'entretenir il y a bien longtemps ?

Car au fond de moi, je sais qu'elle a fini par se lasser de mon absence.
Je l'ai trahie, je l'ai abandonnée...

Vendredi 3 Novembre 2017

J'ai finis par regarder un calendrier après deux jours sans bouger. Je suis dans le déni total. Son absence est si douloureuse que la soif demeure absente. Je suis dans un état proche de celui de la dépression humaine.
Bien que je continue à aller à l'hôpital, je ne ressens plus le plaisir ni même l'envie de soigner des humains.
Je désire rester ici, immobile, à contempler ce portrait de nous deux.
Je préfère ressasser le passé plutôt que de me concentrer sur le présent.

Oui, j'en suis sur la pente de la dépression. Amusant quand on sait que je suis plutôt du genre à regarder le bon côté des choses. Mais sans elle, ce n'est plus pareil.

A mon tour, j'abandonne. Je me suis fais une raison, je suis impuissant face à tous ces événements. Et je ne peux que me lamenter sur mon sort, faible et stupide. Ah il est beau le grand Carlisle, prostré dans son bureau, tenant d'une main fébrile cette plume qu'il chéri comme la prunelle de ses yeux. Prunelle qui s'en était allée, tout comme mon coeur. Et pourtant, j'avais mal à cet endroit là.