Une surprenante rencontre - ft Ellie Sanders

- Yussuf !

Je me retournais rapidement vers cette voix que je reconnaissais bien. Gabe, mon ami de toujours, celui avec lequel j'avais commencé l'université, celui avec qui je réalisais aujourd'hui mon internat et celui qui m'avait soutenu lors du départ d'Alona me rejoignit depuis les quelques marches du centre commercial vers l'entrée du starbuck.

Aujourd'hui était l'anniversaire de Kayla ma fiancée, et il était de mon devoir d'aller lui acheter ce fin bracelet en maille d'or pour honorer le jour de sa naissance. La naissance de cette belle personne aussi bonne que généreuse. J'avais alors profité de ma journée de repos et de son absence afin de perfectionner cette surprise pour qu'elle soit la plus agréable et surprenante possible sans compter l'organisation de cette petite soirée qu'il me fallait rapidement terminer.
Nous nous saluions par une accolade.

- Comment vas tu ? Tu fais au mieux j'espère !

Un sourire vint étirer le recoin de mes lèvres.

- Bien évidemment que je fais au mieux cher frère ! Je crois que c'est...

Puis j'inspirais un coup.

- La bonne ? m'encouragea mon ami en percevant mon doute.

- Et Alona, Gabe ? Je ne sais même pas ce qu'elle est devenue.

Il resta alors silencieux, ne sachant quoi me dire. Cependant une chose était certaine, je ne pouvais plus vivre dans le passé et Kayla était la preuve que la vie valait la peine d'être vécue et qu'il fallait en profiter et enfin se poser à mon âge. Bon, je n'étais pas si vieux que ça ! Seulement je devais profiter de l'occasion qui se présentait.
Je fus ramener à la réalité par un petit garçon qui m'était rentré dedans avant de tomber, la maman se précipitait alors dans notre direction avec une poussette en mains.

- Hey, doucement mon grand, fis-je en l'aidant à se relever. Est ce que ça va ?

Le sourire du jeune enfant en disait long. Tout allait bien. Sa mère le rejoignit avec une petite fille d'environ un an dans la poussette.  

- Reste auprès de maman, d'accord ?

- D'accord mon capitaine ! fis le jeune enfant ce qui me fis sourire et fis rire mon ami que je considérais comme un frère.

La jeune mère nous remercia avant de continuer son chemin tout en tenant cette fois, la main de son fils.

- Tu as beau l'avoir cherché tu n'es pas parvenu à la trouver. Je crois qu'il est réellement temps d'aller de l'avant.

- Et si elle avait besoin de moi en ce moment même ? Je veux dire, certes je me sens incroyablement bien avec Kayla mais... J'ai l'impression de ne pas avoir pu saluer ma vie passé pour démarrer cette nouvelle vie, comme si quelque chose me retenais encore. Elle a disparu du jour au lendemain ! Et si elle avait encore besoin de moi, besoin que je la retrouve ? Et pourtant Dieu sait à quel point j'apprécie Kayla, je me sens incroyablement bien avec elle, mais...

- Cesse de t'inquiéter. Si quelque chose se serait passé, tu l'aurais su. Et si elle avait besoin de toi, elle répondrais à tes messages ou te contacterait par téléphone. Ou me contacterait moi. Tu as le droit d'être heureux, finit-il par ajouter.

J'inspirais longuement avant d'expirer sur un même débit, mais quelque chose retint mon attention alors que je relevais la tête. Un jeune couple fixait quelque chose, ou quelqu'un d'une manière pétrifié, les yeux rond sous un choc et le souffle coupé. Sans plus attendre je déviais le regard pour regarder dans la même direction quand je vis le jeune enfant qui m'était rentré dedans traverser la route avec sa mère tandis qu'une voiture semblant incontrôlable leur fonçait dedans. Ceux ci s'étant arrêtés sous le choc allaient se faire écraser. La mère rapprochait son fils d'elle tandis que ce dernier se recroquevillait comme il le pouvait. C'en était finit si je ne faisais rien !
Rapidement je lançais un sort de protection tout tentant de faire freiner le véhicule en relevant mon point parallèlement à mon épaule et en le tirant vers l'arrière, les phalanges repliées, avec une certaine force que seul mon ami pouvait reconnaitre. J'y mettais toute mon énergie alors que Gabriel se précipita vers eux, et enfin, la voiture freina suffisamment, bien que celle ci parvint tout de même à toucher le petit garçon et en partie sa maman. La poussette, quand à elle, avait été épargnée.
Je rejoignis rapidement mon ami puis tout en examinant rapidement le petit tandis que Gabe prenait la mère, je relevais la tête pour demander d'appeler une ambulance lorsqu'un un regard m'interloqua. Une attitude craintive, un traumatisme se lisait sur le visage de l'un des témoins. Cependant, mon instinct me dicta de m'en méfier. C'était la fille qui se trouvait juste devant nous. M'avait-elle vu, avait elle compris ? Aussi, je ressentais une certaine magie émaner d'elle.

Je voulais la rejoindre alors qu'elle prenait maintenant la fuite, mais je ne pouvais les laisser. Mais mon ami qui me connaissait que trop bien m'incita à la rejoindre alors qu'elle partait. Je secouais la tête avant de continuer de vérifier l'état de l'enfant.

- Vas y je m'en occupe ! m'intima doucement mon ami.

Je me levais alors rapidement avant de marcher à rythme soutenu, puis de courir une fois à l'abri des regards afin de rejoindre la jeune femme à l'orée de la forêt.

- Attendez s'il vous plait ! Je craignais que notre situation, loin des autres ne soit qu'un facteur aggravant de sa peur, mais je n'avais pas le choix, je devais la rattraper. Surtout si elle m'avait vu faire de la magie.

Un bruit de fracas m’avait réveillée ce matin-là. Les yeux à moitié ouverts, je pouvais distinguer la lumière du jour qui traversait les volets que j’avais pourtant fermés. J’avais programmé mon réveil à 9h, mais quelqu’un semblait avoir maladroitement décidé que ma nuit s’arrêterait à 7h35.

Les cheveux ébouriffés, vêtue d’un long sweat et d’un jogging, je me suis rendue dans la cuisine pour y découvrir Stephen, agenouillé sur le sol, qui ramassait des morceaux de sa tasse de café qu’il venait apparemment de faire tomber.
 
-La journée semble bien commencer pour toi. Lui dis-je en m’agenouillant pour l’aider à ramasser les derniers morceaux.
-Ellie ! Je suis désolé si je t’ai réveillée. Mon café m’a échappé des mains.
-Non, ce n’est pas grave. Je.. J’allais me lever de toute façon. Mentis-je pour ne pas le faire culpabiliser. Avec Romy, nous avons prévu de passer la journée au centre commercial.
-Chouette. Mais fais bien attention à toi et appelle-moi si tu as le moindre problème. Ajouta-t-il.
 
Stephen était un homme bien, parfois surprotecteur, mais qui remplissait parfaitement son rôle de père adoptif, bien qu’il ne remplacerait jamais mon père biologique que je ne pouvais malheureusement pas contacter. J’espérais que lui et mes frères étaient en sécurité et qu’ils avaient réussi à se reconstruire à leur manière. Pour ma sécurité, ainsi que la leur, je ne leur avais montré aucun signe de vie car je savais qu’à la moindre tentative de contact, les autorités nous tomberaient tous dessus.

9h00 précise, me voilà arrivée au centre commercial de Seattle où Romy était censée me rejoindre dans peu de temps. Pour patienter, je m’asseyais sur un muret qui longeait l’entrée du centre et offrait la vue sur un immense parking qui était déjà bien bondé. Je n’étais pas une grande adepte des sorties shopping, mais j’avais besoin de me changer les idées ces derniers temps, et Romy avait toujours des idées aussi farfelues les unes que les autres pour me faire oublier que j’étais en réalité une fugitive.

Au bout d’une demi-heure d’attente et à éviter le regard des gens, je reçu un message de Romy qui annonçait être retenue par sa mère et qu’elle ignorait l’heure à laquelle elle allait arriver. Génial Ellie, te voilà seule à durée indéterminée devant un endroit dans lequel tu détestes mettre les pieds. Devais-je attendre ? Rentrer ? La journée venait à peine de commencer et je n’avais aucune idée de la façon dont elle allait se dérouler.

Une femme accompagnée de son petit garçon vinrent interrompre mes réflexions quand ces derniers traversèrent la route sans s’apercevoir qu’une voiture était sur le point de les percuter. Je me levais, prête à intervenir. Mais le drôle comportement d’un homme âgé d’une vingtaine d’années me sauta directement aux yeux. Celui-ci semblait dégager une sorte d’énergie de son poing, ce qui freina automatiquement le véhicule. Est-ce que je faisais un nouvelle fois face à un être surnaturel ? Ou n’était-ce tout simplement qu’une hallucination ? Pourtant, j’en étais presque sûre, cet homme avait étrangement sauvé la vie de ces individus. Cela faisait peu de temps que j’avais appris l’existence d’autres créatures surnaturelles dans le monde, mais ce n’était pas pour autant qu’elles m’inspiraient toutes confiance. Et si cet homme avait de mauvaises intentions et qu’il découvrait mon secret ?

C’est au moment où nos regards se croisèrent que je me décidais à prendre la fuite. Eprise d’angoisse, j’en oubliais l’endroit exact où j’avais garé ma voiture. Mes jambes m’emmenèrent alors à l’entrée de cette forêt, mais la présence de l’homme qui m’avait rattrapée me stoppa aussitôt.
 
-Je ne dirais rien à personne, si c’est que vous voulez entendre ! Rétorquai-je. Maintenant, oubliez que vous m’avez vue. Lui répondis-je avant de reprendre une allure dynamique et de trébucher sur le sol après avoir percuté une pierre. Aïe ! M’écriai-je. 

- Je ne dirais rien à personne, si c’est que vous voulez entendre !

Ses dires confirmaient bien le fait qu'elle avait vu et compris que j'avais fait de la magie. Mais ne faisait-elle pas partie de ce monde surnaturel ? J'étais pourtant certain que si. Je ressentais qu'elle émanait une force différente des humains, une signature qui lui était propre, son énergie magique.

- Maintenant, oubliez que vous m’avez vue.

Oublier ? Comment pouvoir oublier alors que je comprenais pas la raison de sa crainte ? Ne connaissait elle pas sa réelle nature et serait-ce donc la raison pour laquelle elle fuyait ? Et pourquoi fuyait elle vers la forêt ?
Elle semblait pourtant avoir vécu quelque chose de difficile, comme un traumatisme et semblait craindre les surnaturels.
La jeune femme repris sa course avant de trébucher et percuter une pierre, puis un cris plaintif sortit de ses cordes vocales.

J'accouru alors dans sa direction.

- Est ce que ça va ?

La crainte dans son regard ne faisait que s'accroître alors que mes mains s'étaient posées sur ses avant-bras afin de lui venir en aide.

- N'ai pas peur, je ne te ferais rien. Je te le promet, concluais-je en la regardant dans les yeux, accroupit face à la jeune femme tandis que je n'étais pas parvenu à la lâcher de crainte qu'elle ne prenne une fois de plus la fuite sans savoir où aller. La foret pouvait regorger de danger s'y l'on s'y aventurait seul et sans la connaître.
Je baissais légèrement plus la tête afin d'être à son niveau.

- Alors, est ce que ça va ?

Je vis alors son genoux écorché et compris la raison de son petit gémissement. La grosse pierre sur laquelle la jeune femme était tombée lui avait déchiré le jeans ce qui rendait sa peau ainsi que la plaie visible.
Je ne pu empêcher un demi sourire face à la situation.

- Disons que tu ne t'es pas loupée en fuyant. Tu me fuyais, et me voici maintenant à tes côtés. Je me demande bien à quoi ça t'a amener de fuir, en forêt qui plus est !

Mon humeur taquine pouvait bien ne pas lui plaire, d'autant plus que la jeune fille ne me connaissait pas. Mais j'avais décider de la jouer ainsi afin de la mettre à l'aise du mieux que je le pouvais. Cependant, derrière cette petite pique se cachait la réalité, la forêt n'était pas le meilleur endroit pour fuir, quel qu'en soit la nature de ce que l'on fuyait, même un humain. Valait mieux être en plein centre de l'attention que seule et isolée.

- Je m'appelle Yussuf, fige en lui tendant la main pour la saluer, un sourire cordial aux lèvres.

Tout compte fait, j’aurais mieux fait de décliner l’invitation de Romy. Qu’est-ce qui m’avais prise d’accepter une journée shopping ? Je détestais la foule et me pavaner dans les magasins. Et voilà qu’aujourd’hui, je me retrouve à fuir une espèce de sorcier ou je ne sais quelle autre créature surnaturelle capable de mettre ma vie et celle de Stephen en danger. Deux créatures avaient récemment découvert ma véritable nature, et malgré la confiance que je leur accordais, c’était déjà beaucoup trop.

Une étendue d’herbe et de feuilles avaient légèrement amortie ma chute, mais pas suffisamment pour m’éviter une petite déchirure de pantalon, plus précisément, au niveau du genou. La plaie n’était heureusement que superficielle, bien que tout de même un peu douloureuse. Il fallait vraiment que j’arrête d’attirer l’attention, car finalement, la personne que je souhaitais fuir à tout prix se trouvait juste face à moi !  

Je m’efforçai de m’asseoir en gardant un contact visuel avec cet inconnu qui paraissait préoccupé par mon état. Ses yeux étaient d’un vert époustouflant, à tel point que cela en était intimidant. Au premier abord, il ne semblait pas bien méchant.

-Ça va, merci. Ça m’apprendra à ne pas regarder où je mets les pieds. Répondis-je en grimaçant.

Il se questionnait sur les raisons de ma fuite, et je me devais de trouver rapidement une excuse.

-Désolée… J’ai cru voir quelque chose mais je me suis sûrement trompée.

Pourtant, à moins d’avoir été droguée au réveil, j’étais bien certaine de ce que j’avais vu. Il avait sauvé cette femme et son enfant tout en restant à distance. Le jeune inconnu, après s’être présenté sous le nom de Yussuf, me tendis sa main.

-Je m’appelle Ellie. Affirmai-je en attrapant sa main tout en essayant tant bien que mal de me relever. Je ne sais pas si c’est mon imagination qui me joue des tours, ni ce que vous êtes vraiment, mais sachez que si vous y êtes pour quelque chose concernant le sauvetage de ces deux individus, je vous promets de garder le secret. Je ne veux pas avoir de problèmes, j’en ai suffisamment.

Bien que cet homme semblait bienveillant, la peur d’être démasquée était toujours présente. La paranoïa prenait sans cesse le dessus et je ne pouvais malheureusement en discuter avec personne, pas même avec un psy. J’avais envie de croire qu’au fil du temps, toute cette crainte de me retrouver à nouveau enfermée dans un labo finirait par s’atténuer, mais pour le moment, le chemin me paraissait encore bien long. Peut-être qu’il était temps que je me trouve une activité autre que le travail pour me faire oublier que j’étais une fugitive. Le jogging était une idée qui me trottait dans la tête depuis quelques semaines, mais je n’avais pas encore eu l’occasion de me lancer.

-Eh bien, je ne suis pas sûre de ce que j’ai vu. Comme je vous l’ai dit, je pense que mon imagination m’a joué des tours. Répondis-je, naïvement.

En plus de s’intéresser à mon genou, le jeune homme s’intéressa aussitôt à mes problèmes. Il fallait vraiment que j’apprenne à me taire. Sans répondre à sa première question, j’approuvais son aide d’un hochement de tête. Une grimace s’afficha sur mon visage au moment où Yussuf vint appuyer sur ma plaie. Apparemment, le jogging ne sera pas pour tout de suite, mais je devrais me tirer d’affaire d’ici quelques jours, le temps que la plaie cicatrise.

Les secours étaient déjà sur place, ce qui donna à ma rencontre du jour l’idée de nous rapprocher d’eux pour les laisser examiner mon genou. Evidemment, cette proposition ne m’enthousiasmait pas vraiment, elle était même dangereuse. Mais je ne voulais pas paraître suspecte en refusant celle-ci.

Tout en restant sur mes gardes, je suivis Yussuf jusqu’à l’endroit où ce terrible incident avait été évité. La foule qui s’y trouvait ne fit qu’accentuer mon angoisse. Qu’est-ce que je foutais là, bordel ? Peu rassurée, mes yeux cherchèrent le moindre élément qui pouvait sembler suspect, jusqu’au moment où un policier pointa son doigt en ma direction, avant de commencer à s'avancer.

-Excuse-moi, je dois m’en aller. Dis-je à Yussuf avant de prendre la fuite à la vitesse d'un éclair.

Trop de monde, il y avait beaucoup trop de monde. Mais peu importe, je devais fuir le plus loin possible. Ce policier savait peut-être. Il allait sûrement me traquer. Tout en essayant de ne pas penser à la douleur que me causait ma jambe, je m’empressais de quitter la foule, sans prendre le temps de m’excuser auprès de personnes que je bousculais violemment. Je devais me cacher à tout prix, mais où ? Je pris une direction qui menait jusqu’au centre-ville où j’espérais trouver une planque. Yussuf, qui s’était montré si gentil, devait certainement me prendre pour une folle. Mais peu importe, je n’avais pas le temps d’y réfléchir.

C’est en voulant prendre une intersection sans regarder qui pouvait en venir que finalement, ma course se termina couchée au milieu d’un trottoir, après avoir été percutée par un cycliste. Bien joué, Ellie.